Expédition historique : l’Institut à l’Île de Pâques

Isolée du reste du monde, l’Île de Pâques a depuis toujours suscité l’intérêt pour, entre autres, ses impressionnantes sculptures de têtes géantes. Terre reculée de l’océan Pacifique, on y retrouvait moins de 1200 habitants d’origine polynésienne dont leur seul contact avec le monde extérieur est la visite annuelle d’un bateau de ravitaillement chilien. De quoi intriguer le monde scientifique!

L’intérêt médical pour ce peuple donna naissance, en 1964, au projet du docteur Stanley Skoryna, directeur du laboratoire de recherche gastro-intestinales de l’Université McGill, qui fût initialement subventionné par l’Organisation mondiale de la santé. L’expédition scientifique fera partie du Projet de l’adaptation humaine du Programme international de biologie. L’équipe envoyée sur place est alors composée de plus de 30 scientifiques provenant d’une dizaine de pays. Le Canada sera notamment présenté par le professeur Armand Boudreault, virologiste de l’Institut de microbiologie et d’Hygiène de l’Université de Montréal. Il est le seul Canadien français du voyage. Il s’agit alors d’une des plus importantes expéditions scientifiques de l’époque.

Le principal but de cette expédition était d’obtenir des renseignements scientifiques pour l’étude de différentes maladies comme les cancers et les infections, le rôle des facteurs héréditaires mais également des pistes de solutions pour de futurs problèmes causés par les contacts toujours plus fréquents des habitants de l’endroit avec le reste du monde. L’isolement de cette population en fait un sujet d’étude privilégié, que ce soit au niveau écologique, sociologique, anthropologique, génétique, épidémiologique et microbiologique.

 

Nouveau virus : le Cocongo

Le travail de recherche est en partie orienté vers l’étude d’une maladie encore inconnue et qui est présente sur l’Île : le Cocongo. Elle est décrite comme étant une sorte de grippe respiratoire et entérique dont ont été atteints la plupart des habitants après le passage d’un bateau de ravitaillement les reliant au Chili. L’isolement de ce peuple semble expliquer leur manque de résistance face aux maladies extérieures.

Seul virologue du groupe envoyé à l’Île de Pâques, le rôle du docteur Armand Boudreault est, principalement, de prélever chez la population atteinte du virus des échantillons de sérum sanguin. Son travail va consister en l’analyse de ces spécimens de virus. Le travail se fera grâce à son laboratoire portatif contenant le nécessaire de conservation, comme des congélateurs allant jusqu’à moins 85 degrés pour conserver le virus ainsi qu’un congélateur réservé aux cellules vivantes. Ces cellules vivantes avaient été préalablement congelées à l’azote liquide à l’Institut de microbiologie et d’Hygiène de l’Université de Montréal et serviront à la multiplication et à la concentration du virus.

Le rôle de l’INRS

Malheureusement pour le docteur, même après huit mois d’analyse de la population sur l’Île, son séjour ne lui permet pas d’effectuer des analyses poussées sur place. Les installations capables de conserver le virus à de basses températures, ainsi que les appareils de lyophilisation capable de conserver du sérum déshydraté situées à l’Institut, permettent au docteur Boudreault de poursuivre le projet dès son retour à Montréal. Les échantillons concentrés du virus ramenés à l’Institut servirent à des fins d’identification et d’analyse pour l’étude des anticorps, mais également tenter de déceler la propagation du Cocongo ou d’autres virus qu’on eu à combattre les habitants isolés de l’île de Pâques. Cette étude d’une population isolée a donc permis d’en apprendre davantage sur certains traits de maladies, de même que sur la résistance des individus aux maladies.


Ce texte a été rédigé par Sandrine Fitz Back dans le cadre de son stage en techniques de la documentation à l’INRS.